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Comment dépasser les biais cognitifs, ces croyances qui nous freinent ?

Publié dans EDI, édition N°115 – Mars 2022

« Aversion à la perte » dans un jeu de hasard ou « biais de confirmation » qui nous attirent vers nos alter ego : voilà nos biais cognitifs. Or savons-nous qu’ils altèrent nos capacités de transformation et inhibent l’expression de nos potentiels ?

Par Caroline DELANNOY, Head of Coach Community d’Open Mind Neurotechnologies.

Potentiel de transformation bridé

N’en déplaise aux cartésiens acharnés : même dans l’univers économique, nous n’agissons pas toujours selon la boussole de la raison. Daniel Kahneman, psychologue et économiste, prix Nobel en 2002, a démontré que notre système nerveux était articulé autour de deux voies distinctes, qui coexistent¹ . Le système un, intuitif, instinctif et automatique (et donc rapide mais induisant des biais cognitifs), et le système deux, celui de la prise de décision délibérée, réfléchie et consciente. Pour des raisons d’économie d’énergie, le cerveau privilégie largement le système un. Donc plus il y a de stress et d’intensité, comme lors d’une transformation, plus les biais individuels et incorporés dans la culture seront majeurs.

Le hic, justement, c’est que cela ne se voit pas. Ou pas directement. On constate que dans une organisation par exemple, trop peu de femmes accèdent à des postes à responsabilités, même lorsque des mesures proactives sont prises. Rares sont celles qui font un lien clair avec les croyances limitantes qu’elles nourrissent sur elles-mêmes, qui les poussent à ne pas briguer les postes ou à changer de vie avant même que le choix ne se pose. 

De même, on constate dans une organisation des freins au changement, des lenteurs dans l’adoption d’un outil par exemple ou de l’organisation agile². Mais là encore, on invoque la « culture » et peu d’observateurs font le lien avec par exemple une trop grande intensité mal priorisée des changements, qui inhibe les capacités des collaborateurs à s’adapter.

Mesurer les biais cognitifs pour agir

Pour mesurer les biais, il faut dépasser les perceptions avec des mesures plus objectivées : comportements, physiologie. C’est ce qui est fait au travers des mesures au sein de l’expérience apprenante en réalité virtuelle Open Mind Neurotechnologies³. Dès lors, qu’observe-t-on ? Sur notre premier exemple, l’accès des leaders féminins aux postes à responsabilités : par rapport à leurs collègues masculins, les femmes sous-estiment leur efficacité au travail de… 11 points ! Sans que l’on puisse justifier cet écart par les mesures en situation. 

Concernant nos collaborateurs qui peinent à adopter le changement, l’analyse indique que ceux soumis à un fort stress, comme depuis la crise COVID, voient leur flexibilité diminuer de 7 points, et leur créativité de 9 points. 

« 

Faute de culture neuroscientifique, nous négligeons les mécanismes humains qui freinent les transformations, et surtout les moyens efficaces de les adresser rapidement.

»

Le cas des leaders féminins, ou celui des freins « culturels » au changement (qui n’a finalement pas grand chose à voir avec la culture…) ne sont que deux des exemples les plus communs des situations de blocage, en apparence inextricables et qui invitent au fatalisme : « il faut laisser le temps au temps », dira-t-on.

Certes, le temps long a du bon. Mais quand faire atterrir dans l’organisation un virage stratégique est critique – et face à la concurrence accrue, c’est quasiment toujours le cas – se pose la question de ce que l’on peut faire pour lever ces freins, profondément humains, plus rapidement.

Accélération par la Tech

Il faut dépasser la croyance, désormais datée, que concernant le facteur humain, on n’a pas de levier d’action tangible. Car les neurosciences ont fait des progrès considérables depuis 20 ans, jusqu’à aider les collaborateurs clés grâce à des programmes innovants mobilisant la technologie et la donnée.

Comme un miroir de leur fonctionnement, ces expériences immersives par le jeu leur permettent de prendre conscience de ce qui les freine en situation, que ce soient leurs perceptions erronées sur eux-mêmes ou bien la difficulté à absorber le changement et l’incertitude et à récupérer dans un environnement plus intense. Et le jeu là encore, ainsi que les modules collectifs avec leurs pairs permettent de changer les choses.

Un programme d’entraînement de la gestion du stress, de la régulation face à l’incertitude grâce à des méthodes dites de biofeedback a un impact mesurable sur le stress, l’anxiété et la capacité à s’adapter. 

¹ Lire “Thinking Fast & Slow” (2011), son ouvrage de vulgarisation sur le sujet
² Voir en particulier le baromètre State of Agile 2021, au sein duquel la ‘culture’ ressort comme le frein numéro 1 rapporté au déploiement des organisations agiles
³ Voir en particulier l’étude d’impact Open Mind Neurotechnologies™